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12 janvier 2011 3 12 /01 /janvier /2011 12:51

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Je vous propose la lecture du Monde de Sophie du XIIè siècle, qui fut un best-seller en son temps, inspira Daniel Defoe pour Robinson Crusoe, et a été bizarrement oublié depuis: il s’agit du Philosophe autodidacte de Ibn Tufayl, qui fut le maître d’Averroès, le grand médecin et philosophe arabe, surtout connu en Europe pour avoir fait un considérable travail de conservation et d’exégèse des œuvres d’Aristote.  

 

                Le Philosophe autodidacte est un très amusant roman philosophique : il raconte l’histoire d’un nourrisson, Hayy, qui naît, par génération spontanée, sur une île déserte et va donc grandir seul, ce qui l’amènera à devoir comprendre le monde et se comprendre lui-même par ses propres moyens et sans aucune influence extérieure…et tout va y passer, du fonctionnement du corps humain à la course des planètes en passant par la métaphysique ! Son apprentissage passera par une série d’expériences, qui pour certaines sont franchement drôles – j’ai un faible particulier pour le moment où Hayy, pour comprendre le mouvement de rotation des planètes, va se mettre à tourner lui-même sur la plage en décrivant de grands cercles, et sera forcé de s’arrêter parce qu'il a la tête qui tourne...

 

Mais au-delà de l’aspect réjouissant de certains passages, Le Philosophe autodidacte est un vrai livre de philosophie, qui propose un modèle complet de compréhension du monde, partant de la connaissance sensible pour aboutir à la métaphysique et à l’élévation des âmes par l’amitié philosophique, suivant ainsi le modèle platonicien.

Les progrès philosophiques de Hayy vont suivre ses différents âges, sa formation étant divisée en sept cycles de sept ans chacun – le chiffre sept ayant bien sûr ici sa valeur symbolique habituelle. Par exemple, Hayy consacre ses sept premières années sur l’île à l’observation du monde sensible : il se lie d’amitié avec une gazelle, qui le nourrit et le protège, fait l’expérience des sensations corporelles, et observe les animaux et le monde qui l’entoure, pour comprendre que lui, homme, est plus fragile que les animaux et est obligé de fabriquer des objets pour se protéger.

Au début du cycle suivant, la gazelle meurt et Hayy s’efforce de comprendre ce phénomène nouveau : il dissèque donc la gazelle, comprend que c’est son cœur qui lui permettait d’être en vie, et conçoit quelque chose comme une âme abritée par ce cœur et qui se sépare du corps au moment de la mort.

Hayy va ainsi progresser, de sept ans en sept ans, du monde matériel au monde divin des idées, pour aller jusqu’à la pure contemplation, à une forme d’extase mystique que les néoplatoniciens ont théorisée - à ce moment-là, il rencontrera d'ailleurs un autre homme avec qui il pourra s'élever grâce au dialogue et à l'amitié philosophiques, ce qui lui permettra d'achever son ascension.

 

Le Philosophe autodidacte est non seulement une lecture agréable et souvent amusante, mais aussi une excellente initiation aux thèmes de la philosophie antique, et notamment platonicienne, dont Ibn Tufayl fait ici la synthèse d’une manière très pédagogique...un vrai régal, qui, en 800 ans, n'a rien perdu de sa fraîcheur !

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commentaires

I
<br /> ça a l'air intéressant ça ! je note !<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Mais oui ! A choper en bibliothèque par contre, je viens de me rendre compte qu'il n'a pas été réédité depuis l'édition que j'ai...Et c'est bien dommage !<br /> <br /> <br /> <br />